(récits de voyages, en fait plutôt asiatiques que forestiers, mais on se comprend)
22 August 2006
Nouvelles du front. Hier, periple indien en bus a l extreme sud, la ville de la pointe qui separe ocean indien et mer arabic : Kanyakumari ou Cape Comorin (oui, chaque ville indienne a 2 noms, ce qui facilite encore plus les communications avec les locaux comme vous pouvez imaginer...). 4h30 dans un bus assez delabre mais correct avec Sabrina la st galloise, seule escale : 10 minutes a Trivandrum durant laquelle je m etais endormie, le bras pendant par la fenetre... Reveillee en sursaut par un cingle vendeur de journeaux et de biscuits aux cacahutetes qui me tapait sur le bras avec son Hindi Times pour attirer mon attention. Arrivee a la ville vers 13.30, calme impressionnant par rapport a Trivandrum. Normal, cest une ville de pelerinage ou les touristes sont aussi nombreux que les vendeurs d anoraks ( c est a dire peu, pour ceux qui ne suivraient pas...). Autre difference, a Kovalam les vendeurs et restos te harcelent vocalement pour que tu rentres. Ici, c est carrement physique (mec avec un perroquet en cage : "if you give me 500 rupees, i release the bird"). Autre etrangete : des vieux clodos dont la seule possession est une balance (oui oui un pese personne) et qui attendent devant les temple. Trip mystique en rapport avec l hindouisme demandais-je plus tard a des erudits ? Non c est juste pour se faire du fric, c est 5 rupees la pesee et comme la plupart des indiens n ont pas de balance ca marche. Apres avoir visite le rocher du "wandering monk", Vivakananda, ou on est arrivees par ferry (plutot touristique et ininteressant) puis le musee Vivakananda (oui ce moine de la fin 19eme est une vraie star ici, il a offert son corps en pitance a un tigre histoire de se sentir utile, mais le tigre aurait dit "bof non en fait je te laisse la vie", la classe pour Vivakananda)ou un drole de vieux guide aux dents rares me donnait de grandes tapes dans le dos chaque fois que je temoignait un peu d interet pour sa culture ("This one is goddess Parvati, right ?" "yes very good very good !" et vlan, une grande claque dans le dos). Bref apres tout ca, on s est enfin decidees pour le temple, qui etait le but de notre visite, sachant que dans le Kerala, les non hindus ne peuvent pas rentrer dans les temples et qu ici, dans le Tamil Nadu, ils peuvent. De l exterieur, on aurait dit un immense supermarche Leclerc peint en raye rouge et blanc, genre gros bloc bien laid (et apres on vante les beautes des temples hindus...). A l entree, on se fait harponner par une abjecte creature dont la ressemblance avec Gollum du Seigneur des Anneaux etait assez troublante : 1m35, age indefinissable, la peau sur les os, le dos voute,l oeil malicieux et bien sur les dents pourries, vetu en tout et pour tout d un vieux tissu faisant office de slip. Seule difference : la couleur de la peau et celle du slip. Bref, telles des hobbits peu rassurees, nous nous faisont entrainer dans le sombre temple ou des la premiere statue, le ton est donnee. Gollum nous mime explicitement qu il faut qu on s agenouille et se prosterne 3 fois ("tritaaaaymes, tritaaaymes"), puis il se trempe les doigts dans une coupelle remplie d huile surement sacree et nous frictionne le haut de la tete avec. Ensuite, il faut filer du fric pour avoir une offrande (feuille de bananier avec des fleurs dedans, plus du ketchup et de la moutarde - bon ok, surement du safran ou un truc du genre)a filer a la deesse Parvati, la star du temple (qui avait un piercing au nez, "daymooond, daymooond" nous expliqua gollum) et de nouveau "tritaymes tritaymes" devant sa statue, huile sur la tete, et notre guide nous dessine le fameux bhindi sur le front avec la moutarde et le ketchup. Ca continue dans tout le temple, prosternation, huile et priere devant les pelerins eux aussi en slip qui nous regardaient d un air indefinissable. Le summum de l humiliation est atteint a mi parcours au moment ou notre ami gollum nous demande cette fois de nous prosterner devant... un mur. Un simple mur. "ca sent la couillonnade" dis-je a sabrina. Bref, 2 minutes plus tard, gollum nous fait assoir et nous fait comprendre qu il faut "moni, moni" .Apparement, son vocabulaire anglais se resumait en tout et pour tout aux trois mots "three times", "diamond" et "money"... efficace puisqu on lui donne 15 rupees, en braves touristes. Malheuremusement, Gollum s enerve (oui comme dans le film quand il essaie de piquer l anneau a Frodon) car il voulait plus, bien plus. C en etait decidement trop avec le coup du mur, alors je decidai de trouver la sortie moi meme. Je me rendis vite compte que c etait mission impossible et c est finalement notre ami qui avait retrouve le sourire qui nous guida vers la lumiere, autrement dit la plage. Soulagees, on est parties retrouver notre bus apres s etre ravitaillees en bananes rouges pour le trajet (bien meilleures que les jaunes, va savoir pourquoi). Ces bus indiens sont une reelle experience qui saura combler tous vos sens. L ouie d abord : des klaxons incessants pour tout et rien, les discussions mouvementees entre controleur de billet et passagers, et surtout l etrange vacarme du moteur, qui ne laisse presager rien de bon quand a la fiabilite de l appareil. L odorat ensuite : un joyeux melange compose de gaz d echappement, de sueur et de curry, qui remonte des stands de bouffe installes le long des routes. La vue n est pas en reste : rizieres comme sur les cartes postales, inombrables petits shops d epices (comme sur les cartes aussi), vieil indien qui remet sa jupe (je temoigne, ils ont bien un slip en dessous), vache qui mange des sacs en plastique... Cote touche, en fait, c est surtout la barre de metal du siege avant, veritable sauveur de vie, seul objet auquel se raccrocher quand Shakandi (dieu sait son nom) le driver, prend un virage a 120 degres tout en depassant un camion de noix de coco et en evitant une vache sur le cote droit. Dans ces cas la, je ferme les yeux et je prie pour qu on retrouve mon corps rapidement, si possible dans une position dramaturgiquement interessante, le teint diaphane et un sourire fige sur le visage, plutot que 6 semaines plus tard, dans un buisson, le corps dechiquete par les vers et les mouches. Finalement, je suis toujours la et les seuls sequelles de ce voyage furent les incroyables quantites de crasse (et d huile sacree) evacuees dans la douche le soir meme et une grande envie de recommencer, cette fois en train pour voir...
Labels:
bus,
Inde,
Kanyakumari
Subscribe to:
Post Comments (Atom)
No comments:
Post a Comment